L'Islande, modèle de sortie de crise ?
Démocratie directe, coupes dans les dettes... Un livre revient sur les solutions non orthodoxes du petit Etat, passé tout près du naufrage financier. Pascal Riché, Comment l'Islande a vaincu la crise, éditions Versilio, 115 p.
«Que Dieu sauve l’Islande.» Lorsque
le Premier ministre, Geir Haarde, conclut ainsi son adresse aux
citoyens de la petite nation insulaire, en octobre 2008, ces derniers
comprennent que les temps s'annoncent difficiles. Après plusieurs années
d'exubérance financière et de consommation à tout crin, l'Islande
coule, lestée d'un secteur bancaire obèse qui ne résiste pas plus que
l'Europe et les Etats-Unis à la crise mondiale. Le pays, qui voit son
PIB chuter de 6,6% en 2009, découvre un chômage jusqu'alors
quasi-inexistant.
C'est cette chute, mais surtout les solutions mises en œuvre par le pays pour se redresser, que décortique Pascal Riché (rédacteur en chef de Rue89) dans un livre -et un e-book- paru jeudi : Comment l'Islande a vaincu la crise (éditions Versilio, 115 p.). Un reportage dans «le labo de l'Europe», et l'occasion de dépasser quelques sympathiques clichés au sujet du redressement islandais. Non, l'île n'a pas connu de «révolution», mais une simple rupture de coalition gouvernementale sous la pression populaire.
1. Etre sélectif dans ses renflouements
En 2008, la taille des banques islandaises représente dix fois le PIB national. Autant dire que le pays n'a pas les moyens de voler à leur secours au lendemain de la chute de Lehman Brothers. Seul les dépôts des Islandais reçoivent donc la garantie de l'Etat. Les épargnants étrangers ─ britanniques et néerlandais, notamment ─ qui avaient confié leurs sous aux établissements locaux en sont pour leur frais, et se retournent vers leurs propres gouvernements. En Islande, de nouvelles banques sont créées pour reprendre les opérations domestiques. Contrairement à une idée reçue, sur les trois établissements concernés, deux ont d'ores et déjà été privatisées.
2. Ecouter le peuple
Petit à petit, les rassemblements se massifient devant l'Assemblée islandaise. En janvier 2009, les manifestants finissent par obtenir la démission du Premier ministre, de la direction de l’Autorité de surveillance des banques et de celle de la banque centrale. Puis, par deux référendums, l'Etat choisira de ne pas rembourser les créances réclamées par les gouvernements britannique et néerlandais. Une nouvelle constitution est élaborée sur la base des travaux de vingt-cinq citoyens «ordinaires» ─ plutôt médecins et professeurs que pêcheurs et ouvriers, néanmoins─ et de contributions recueillies sur les réseaux sociaux. Mais 49% seulement des citoyens participent au référendum validant le projet, et le dernier mot reviendra à la nouvelle Assemblée élue en avril prochain.
3. Punir (avec modération)
Passé le plus dur de la crise, vient le temps de la recherche des responsabilités. Ce n'est pas l'épisode le plus glorieux de la saga islandaise. Unique politicien poursuivi, le Premier ministre au moment du krach, Geir Haarde, fait surtout figure de bouc émissaire. Il sera condamné pour une formalité et pas même sanctionné. Du côté des banquiers, deux spéculateurs seulement ont été condamnés pour l'instant, bien que de nombreux dossiers restent ouverts.
4. Couper dans les dettes
Les mesure ont fait moins de bruit que la fameuse constitution «2.0». Mais, selon Riché, elles sont bien «les plus courageuses et radicales». Pour sauver les ménages les plus endettés de la faillite personnelle, l'Etat incite les banques a écréter leurs créances : au-delà de 110% de la valeur du logement, la dette est effacée. Des mesures similaries sont prises pour les PME, tandis que les prêts basés sur les variations de devises, destructeurs dans la crise, sont proscrits.
L'Islande, modèle pour l'Europe ? Certes, sa reprise reste fragile, et la démocratie directe est plus simple à appliquer dans une société de 320 000 habitants ─ dont les deux tiers dans une seule agglomération urbaine ─ bien plus homogène que dans les grands pays continentaux. Mais, avec une croissance attendue à 2,7% en 2013 et un chômage proche de 5% fin 2012, comment ne pas s'intéresser aux ingrédients du miracle islandais ? Vu le «succès» des politiques européennes actuelles, le continent aurait bien besoin, lui aussi, de nouvelles recettes.
C'est cette chute, mais surtout les solutions mises en œuvre par le pays pour se redresser, que décortique Pascal Riché (rédacteur en chef de Rue89) dans un livre -et un e-book- paru jeudi : Comment l'Islande a vaincu la crise (éditions Versilio, 115 p.). Un reportage dans «le labo de l'Europe», et l'occasion de dépasser quelques sympathiques clichés au sujet du redressement islandais. Non, l'île n'a pas connu de «révolution», mais une simple rupture de coalition gouvernementale sous la pression populaire.
1. Etre sélectif dans ses renflouements
En 2008, la taille des banques islandaises représente dix fois le PIB national. Autant dire que le pays n'a pas les moyens de voler à leur secours au lendemain de la chute de Lehman Brothers. Seul les dépôts des Islandais reçoivent donc la garantie de l'Etat. Les épargnants étrangers ─ britanniques et néerlandais, notamment ─ qui avaient confié leurs sous aux établissements locaux en sont pour leur frais, et se retournent vers leurs propres gouvernements. En Islande, de nouvelles banques sont créées pour reprendre les opérations domestiques. Contrairement à une idée reçue, sur les trois établissements concernés, deux ont d'ores et déjà été privatisées.
2. Ecouter le peuple
Petit à petit, les rassemblements se massifient devant l'Assemblée islandaise. En janvier 2009, les manifestants finissent par obtenir la démission du Premier ministre, de la direction de l’Autorité de surveillance des banques et de celle de la banque centrale. Puis, par deux référendums, l'Etat choisira de ne pas rembourser les créances réclamées par les gouvernements britannique et néerlandais. Une nouvelle constitution est élaborée sur la base des travaux de vingt-cinq citoyens «ordinaires» ─ plutôt médecins et professeurs que pêcheurs et ouvriers, néanmoins─ et de contributions recueillies sur les réseaux sociaux. Mais 49% seulement des citoyens participent au référendum validant le projet, et le dernier mot reviendra à la nouvelle Assemblée élue en avril prochain.
3. Punir (avec modération)
Passé le plus dur de la crise, vient le temps de la recherche des responsabilités. Ce n'est pas l'épisode le plus glorieux de la saga islandaise. Unique politicien poursuivi, le Premier ministre au moment du krach, Geir Haarde, fait surtout figure de bouc émissaire. Il sera condamné pour une formalité et pas même sanctionné. Du côté des banquiers, deux spéculateurs seulement ont été condamnés pour l'instant, bien que de nombreux dossiers restent ouverts.
4. Couper dans les dettes
Les mesure ont fait moins de bruit que la fameuse constitution «2.0». Mais, selon Riché, elles sont bien «les plus courageuses et radicales». Pour sauver les ménages les plus endettés de la faillite personnelle, l'Etat incite les banques a écréter leurs créances : au-delà de 110% de la valeur du logement, la dette est effacée. Des mesures similaries sont prises pour les PME, tandis que les prêts basés sur les variations de devises, destructeurs dans la crise, sont proscrits.
L'Islande, modèle pour l'Europe ? Certes, sa reprise reste fragile, et la démocratie directe est plus simple à appliquer dans une société de 320 000 habitants ─ dont les deux tiers dans une seule agglomération urbaine ─ bien plus homogène que dans les grands pays continentaux. Mais, avec une croissance attendue à 2,7% en 2013 et un chômage proche de 5% fin 2012, comment ne pas s'intéresser aux ingrédients du miracle islandais ? Vu le «succès» des politiques européennes actuelles, le continent aurait bien besoin, lui aussi, de nouvelles recettes.
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